Déc 15 2017

L’écriture inclusive? Un insupportable contre-sens

styloMa tribune publiée par le Drenche :

Une langue est le produit d’une société et le reflet des rapports sociaux… pas un outil pour les faire évoluer. Il serait trop facile – et totalement contre-productif – de rejeter sur l’orthographe nos propres responsabilités.

Prétendre vouloir aider la cause des femmes en saupoudrant les phrases de « .e. » et de « eur.rice » serait se tromper de combat et s’acquitter à bon compte du devoir de transformation de la société. C’est bien moins l’orthographe que le quotidien, la répartition des tâches dans la famille, les rôles alloués aux hommes et aux femmes dans la publicité ou dans le contenu de nos programmes scolaires qui nourrissent les stéréotypes. Le langage texto, utilisé depuis plus de 10 ans par les jeunes, et faisant fi de tout accord, a-t-il contribué à réduire le sexisme ?

A l’heure où l’on songe de plus en plus à revenir aux fondamentaux dans le primaire pour pallier les difficultés des élèves à maîtriser notre langue, serait-il bien raisonnable de créer de nouvelles contraintes, au détriment de la lisibilité, de la fluidité… et finalement du plaisir de l’expression ? Si l’on voulait encore davantage détourner les jeunes de la lecture et de l’écriture, on ne s’y prendrait pas autrement !

Pour rester vivante, la langue doit demeurer un moyen de communication efficient, comme l’ont souligné les Immortels de l’Académie française en dénonçant un « péril mortel ». Ce qui est vrai en France l’est encore plus à l’international et pour moi qui voyage aux quatre coins du monde et y entend des plaintes sur les difficultés supposées de l’apprentissage du français, je ne pourrais me résoudre à accepter une complexification qui découragerait encore davantage les étudiants et amoureux potentiels du français et de la Francophonie. Alors que notre langue résiste avec courage aux ambitions hégémoniques de l’anglais et à la percée d’autres langues comme le chinois, ne l’assassinons pas en l’affublant d’oripeaux qui la rendraient disgracieuse et difficile à pratiquer.

Il ne s’agit donc pas de refuser par conservatisme ou par nostalgie du passé toute évolution de notre langue, mais au contraire de s’engager pour l’avenir de celle-ci, pour qu’elle demeure ce que l’on attend avant tout d’une langue : un outil maniable et plaisant de transmission et d’échange. C’est par l’usage qu’en font ses locuteurs qu’une langue évolue, pas par le diktat idéologique de quelques technocrates – fussent-ils animés des intentions
les plus louables.